Voici une réflexion en trois temps sur les méthodes d’endormissement avec au menu des preuves scientifiques tricotées avec cœur pour vous aider à prendre des décisions éclairées pour le sommeil de votre enfant.
Veuillez noter que ce texte s’adresse aux parents d’enfants et non pas aux parents de nourrissons – voir la section sur le moment idéal ci-dessous pour plus de détails.
Dans un premier temps, voyons comment les études nous permettent de répondre à ces questions:
- C’est quoi une méthode d’endormissement?
- Pourquoi avoir recours à une méthode? Et est-ce que ça fonctionne?
- Est-ce que c’est le bon moment? Quand est-ce approprié?
- Est-ce que c’est sécuritaire? À court- et long-terme?
- Que faire alors?
Ensuite, écoutons Évelyne Touchette et Olivier Bernard, Le Pharmachien, faire le point suite à son émission sur le sommeil de bébé.
Et pour terminer cette plongée dans la science des méthodes d’endormissement, nous vous partageons 3 liens vers de courtes lectures complémentaires…parce qu’il y a tellement à dire sur ce sujet (et surtout beaucoup à faire côté recherche, nous y travaillons!).
C’est quoi une méthode d’endormissement?
En recherche et en pratique, on divise en trois grandes catégories les méthodes d’endormissement. Les catégories ne sont pas faites pour distinguer les pratiques qui fonctionnent mieux ou moins bien, elles servent simplement à organiser les méthodes selon les écoles de pensée en psychologie.
À la maison, ces catégories ont peu d’influence sur nos choix parentaux, ce qui fait que notre approche parentale est souvent un mélange d’un peu de tout ceci selon les besoins de l’enfant et de la famille (et c’est très bien ainsi) et ce que notre coeur nous dicte.
Voici un peu de théorie et de données issues de la recherche pour aiguiser notre sens critique face aux diverses techniques:
Les grandes catégories de méthodes d’endormissement:
- Méthodes comportementales. Elles prônent la réduction de l’implication émotionnelle et physique du parent et l’utilisation de délais graduels de réponse à l’endormissement ou lors d’un éveil nocturne. Le but est de donner à l’enfant l’opportunité de s’autoapaiser pour apprendre à s’endormir par lui-même. Il existe plusieurs variantes et possibilités d’adaptation telles que les techniques d’extinction standard dont la technique du 5-10-15, d’extinction avec présence parentale comme celle de la chaise et d’extinction graduelle.
- Méthodes cognitives comportementales. Elles suggèrent des méthodes qui interviennent auprès de la relation parents-enfant. Par exemple, ces méthodes travaillent sur les attentes, les croyances et les perceptions des parents en matière de sommeil et lorsque l’enfant est plus vieux, des composantes sont ajoutées, comme des techniques de relaxation, une modification des pensées anxieuses de l’enfant, des techniques d’imagerie positive et autres.
- Méthodes intégrant les notions d’attachement. Elles sont celles qui introduisent un objet dit « transitionnel » tel une doudou. Un objet sécuritaire est choisi par le parent lorsque l’enfant est en bas âge et il est présenté, utilisé, caliné, etc. de façon routinière lors des endormissements, de jour comme de nuit. Au fur et à mesure, l’enfant investira émotionnellement la doudou, il s’y attachera de plus en plus, ce qui permettra de transférer une partie du réconfort parental au doudou. Cet attachement à la doudou aide à faire la transition vers l’auto-apaisement, une condition favorable pour s’endormir par soi-même.
Pourquoi avoir recours à une méthode? Et est-ce que ça fonctionne?
Les méthodes d’endormissement sont un choix parental d’abord et avant tout. Il y a différentes raisons qui peuvent amener un parent à vouloir adopter une méthode d’endormissement.
Avoir des attentes réalistes par rapport à l’endormissement et l’autonomie au sommeil (s’endormir sans être accompagné) est très important, car on ne peut pas « faire dormir » quelqu’un et les trucs magiques n’existent pas.
Les études concluent qu’utiliser une méthode ou une autre améliore modestement la qualité et la durée de sommeil de l’enfant et de la mère (les pères n’étant pas encore beaucoup étudiés). Le « modestement » ici veut dire que pour certaines familles ça fonctionne mieux que pour d’autres donc en moyenne on voit des effets …qui ne sont pas magiques. Et ce peu importe la méthode.
Il est bon de se rappeler que le sommeil se développe avec le temps (maturation du cerveau), mais que parfois comme dans l’avion, la chose à faire, la moins risquée et pour le bien de tous, est de mettre son masque à oxygène en premier.
Les méthodes d’endormissement au sommeil sont une façon parmi tant d’autres d’agir pour tenter de mettre des conditions favorables pour que le sommeil de toute la famille soit réparateur et suffisant.
Chaque enfant est différent, chaque famille est différente. Il n’en reste pas moins que le besoin de dormir est vital pour les enfants comme pour les parents.
Est-ce que c’est le bon moment? Quand est-ce approprié?
Après 6 mois, il n’y a pas d’âge précis pour commencer ou changer les méthodes d’endormissement, car chaque enfant à son rythme bien à lui. Par contre, certaines balises existent entourant les méthodes d’**endormissement comportementales** (surtout celles avec extinction). De façon générale on ne recommande pas ce type de méthode:
- Si l’enfant a moins de 6 mois parce que le cerveau n’est pas assez mature pour s’apaiser seul.
- Si l’enfant a encore besoin de se nourrir au cours de la nuit.
- Si l’enfant a un petit poids sur sa courbe de croissance ou que son développement demande une attention particulière.
- Si l’enfant a une condition physique qui perturbe le rythme de maturation de sommeil.
- Si l’enfant vit de l’anxiété et du stress ou qu’il a besoin de proximité ou d’autres besoins émotionnels à combler pendant la nuit. Par exemple, il peut être judicieux de privilégier d’autres méthodes quand le lien d’attachement avec les parents est plus anxieux, soit à cause de la phase de l’angoisse de séparation vers 8 mois ou parce que l’enfant a un tempérament anxieux ou qu’il vit de l’anxiété de séparation (après 3 ans), par exemple.
Voici des exemples de questions à se poser pour évaluer si c’est le moment idéal pour commencer ou changer de méthodes d’endormissement :
Est-ce que c’est le bon moment pour l’enfant?
- Est-ce que mon enfant a besoin de boire la nuit? Est-ce que mon enfant suit sa courbe de croissance? Il est en effet important de respecter les besoins physiologiques de l’enfant.
- Est-ce que mon enfant a un rhume ?
- Est-ce que nous sommes d’accord sur le fait que notre enfant est prêt pour être guidé dans son apprentissage de l’autonomie au sommeil? (préférablement avant que l’enfant soit mis dans un lit de grand pour faciliter cette transition).
- Est-ce qu’il vit de l’angoisse de séparation?
Est-ce que c’est le bon moment pour leurs parents?
- Est-ce que nous sommes en forme et pas trop stressés pour accompagner avec douceur et patience les résistances et autres défis en lien avec l’endormissement (les pleurs, par exemple)? Par exemple, il peut être important de ne pas attendre d’être trop fatigué(e)s ou épuisé(e)s, il est préférable d’essayer d’agir avant de se sentir à bout.
- Est-ce un bon moment pour absorber la dette de sommeil parentale possible pendant l’apprentissage? Comme il y a en moyenne une transition de 3 à 5 jours, choisir un temps propice pour les parents est aussi important. Si l’apprentissage semble prendre plus d’une semaine environ, il est préférable de se requestionner sur le moment idéal.
- Est-ce qu’on est d’accord, est-ce que les deux parents sont à l’aise avec la marche à suivre? Est-ce qu’on est prêt à se soutenir pendant la période d’apprentissage? Avons-nous un plan de match? Des questions à se poser à tête reposée, autant que possible, parce que deux têtes valent mieux qu’une.
Est-ce que c’est sécuritaire? À court- et long-terme?
La question qui fait hésiter certaines familles à savoir si une ou l’autre de ces méthodes aura des conséquences négatives sur le sommeil, le développement de leur enfant ou sur le lien d’attachement est légitime.
Les études, même si pas assez nombreuses pour permettre un consensus scientifique, sont de bonne qualité (études contrôlées et randomisées, longitudinales, etc.) et démontrent qu’il n’en est rien. Aucune étude à ce jour n’a pu démontrer un impact négatif sur la santé, le développement des enfants ou même sur le lien d’attachement. Il est à noter que la majorité des études ont été faites auprès de familles ayant des liens sécurisants avec leur enfant. À ce jour, nous ne pouvons pas conclure sur les impacts d’une ou l’autre des méthodes d’endormissement dans des contextes familiaux affectés par un contexte insécurisant.
Les scientifiques ont encore beaucoup de zones grises à éclaircir avant de pouvoir offrir des réponses limpides aux parents et aux professionnel(le)s. On y travaille!
Que faire alors ?Se rappeler que l’apprentissage du sommeil est comme celui de la marche. Le cerveau va finir par y arriver (merci à la maturation) et les seules choses que les parents contrôlent sont les conditions qui entourent le développement de cet apprentissage. Les parents peuvent et se doivent d’adapter, en toute confiance et en étant concordants, les méthodes d’endormissement aux besoins de leurs enfants, mais aussi de leurs besoins de sommeil. Les parents peuvent s’inspirer de l’une ou l’autre ou de toutes ces catégories de méthodes pour mettre les conditions favorables en place quand ils jugent que c’est le moment idéal pour que leur enfant apprenne à s’endormir par lui-même. |
Il faut tricoter ensemble pour que ça marche, science à l’appui.
Pour continuer cette réflexion, voici dans un deuxième temps, une courte vidéo.
Lors de son passage à l’émission d’Olivier Bernard, Les aventures du Pharmachien, sur le sommeil des bébés, Évelyne a pu faire le point sur de multiples sujets avec lui. Dans cette vidéo, Olivier nous partage le fruit de sa réflexion sur les méthodes d’intervention après avoir épluché la littérature scientifique sur le sommeil des tout-petits pour son émission. Des propos à jour et nuancés qui en apaiseront plusieurs.
Evelyne nous rappelle que lorsque les deux parents vivent ensemble, il faut se rappeler que quand vient le temps d’aller au lit, il est important de « tricoter ensemble ». Pour que ça marche, une chose est certaine c’est qu’il faut éviter « qu’un tricote d’un bord et l’autre de l’autre ». L’important est d’avoir UN message clair à donner à l’enfant.
Le conflit parental n’aide pas le sommeil des petits (ni celui des parents). Il faut être en accord et à l’aise avec ce que l’on choisit pour se faire confiance. Il faut être d’accord ensemble, être concordant, pour tricoter dans le même sens. |
Parce qu’il y tant à dire
Pour terminer notre plongée dans l’état des connaissances scientifiques sur les méthodes d’endormissement, voici des suggestions de lectures complémentaires :
- « Comment gérer la fatigue » décrit 4 étapes pour se poser les bonnes questions afin de déterminer Qui a besoin de dormir? et tenter d’y voir plus clair pour retrouver son sommeil.
- Nous avons contribué à Naître et Grandir avec un texte sur des pistes de solutions, de jour comme de nuit «Le sommeil: aider son enfant à s’endormir » qui pourrait aussi vous intéresser pour voir le sommeil de façon plus globale, holistique diraient certain(e)s.
- Le témoignage d’une maman médecin où s’entremêlent les attentes, la science, la pratique et sa réalité en lien avec le sommeil de sa fille et le sien.